DOSSIER : la diaspora italienne, Carlo Molinari
Après nous être immiscés dans la vie des ouvriers du bassin miniers, à travers le prisme de ce fameux joueur qu’était Piantoni, nous allons remonter les terres de la Lorraine pour nous arrêter dans la région de Longwy au nord au fond de la vallée de Chiers. Et c’est Carlo Molinari qui va nous accompagner.
Fier d’être lorrain, et de ses origines italiennes
Charles (dit Carlo) Molinari a aujourd’hui 87 ans. Il a été le président du FC Metz de 1967 à 2009, mis à part un intermède de 5 ans entre 1978 et 1983, de manière continue. Il est le symbole de ces présidents harnachés à leur club, dont la sympathie n’a quasiment jamais pâtie des résultats en dents de scie du club. Il est tombé dans la soupe du football pratiquement par hasard. Il n’allait pas faire carrière, pas assez bon, il a tout de même joué en cadet au sein du club Grenat, mais pour lui le sport est passion « comme tout Italien celle-ci est naturelle pour le sport. J’aime le jeu, les joueurs. »
Pourtant l’arrivée dans le football du natif de Villerupt n’était pas si évident. L’actuel vice-président du FC Metz a été champion de de motocross, trois fois entre 1952 et 1955. Alors quand à 34 ans, il prend les rênes du club phare du territoire, qui vient d’accéder en première division, à Paul Mayer, le doute persiste. Il remportera deux coupes de France (1984, 1988), une Coupe de la ligue (1996), sera vice-champion en 1998, et participera à 9 campagnes européennes, dont un match face au grand Napoli de Dino Zoff en 1969-1970.
Une équipe forgée à la minette
L’équipe de Moselle aura su garder une identité forte pendant sa présidence, proche de la population environnante. Carlo Molinari se repose sur la forte colonie italienne de Lorraine qui est un creuset de jeunes pépites, et il a toujours eu cette volonté « d’aider cette jeunesse pour qui le football et le sport en général est un vecteur social. » De cette « pépinière », plusieurs joueurs d’origine italienne ont épousé une carrière professionnelle, et ont été, à un moment donné, le socle du FC Metz, et des rouages essentiels. Elia Brembila, Patrick Battiston, Bernard Zénier, Michel Ettore, Vincent Bracigliano, le talentueux Carmelo Micciche, Marco Morgante, Stéphane D’angelo, David Ziteli… Tous ont cette particularité d’avoir grandi dans les cités ouvrières près des usines sidérurgiques du territoire.
Le père de Carlo Molinari arrive lui en France en 1932, un an avant sa naissance. Comme de nombreux italiens, polonais, ou belges, il profite des contrats bilatéraux signés entre leur pays, et gérés par la Société Générale d’Immigration, qui validait les profils et les aptitudes des nouveau arrivants. La société veillait à ce que les entrants soient en bonne santé, et en forme physiquement.
Son père, transporteur, s’établit dans le fond de la vallée de la Chiers, dans la région de Longwy au nord. Dans ce territoire, comme à Briey au sud, les usines sidérurgiques se développent à grande vitesse, grâce à une demande en minerai, de plus en plus grande. Les gigantesques installations de haut-fourneau, les nouvelles techniques de productions telles que l’affinage Thomas-Gilchrist, s’adaptent bien à l’exploitation de la « minette » lorraine et de ses ressources géologiques.
Il valait mieux jouer au foot qu’à la mine
La région devient une tour de Babbel où de nombreux peuples se côtoient. La colonie issue du pays de Dante est toutefois la plus conséquente, et Villerupt n’échappe pas à la règle. Plusieurs quartiers et bars sont sous pavillon italien. A cette époque, « les frères Rivelli, les Piantoni et autres Italiens composaient plus de la moitié de l’équipe de France. » Pendant la guerre, en 1942, le petit Carlo est envoyé en Italie à Biandronno, près de Varese. Le village de son père. Il va y rester 6 ans avant de revenir en France.
Toutefois, Carlo Molinari peut avoir des regrets. Tout comme Georges Sesia, joueur d’origine italienne, lui aussi né à Villerupt, qui a été le plus gros transfert en France en 1952, un autre grand et célèbre footballeur n’a pas joué pour les FC Metz, au regret du président : Michel Platini. « Un Messin, n’a pas été recruté par le club. C’était le fils d’Aldo Platini et les gens le trouvaient moins fort que son père. On m’avait dit qu’il avait un gros cul et qu’il n’arrivait pas à se retourner.»
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