Dossier : Blasphème, Dieu et Calcio – Que dit la loi sur le délit de blasphème en Italie ? (1/3)

Par Boris Abbate publié le 26 Fév 2021
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Quel est le point commun entre Milan Skriniar, Manuel Lazzari, Gianluigi Buffon ou encore Bryan Cristante (pour ne citer qu’eux) ? Leur couleur de cheveux ? Evidemment que non. Leur nombre de minutes jouées cette saison ? Absolument pas. En réalité, tous ont été – ou ont risqué – une suspension pour des propos jugés blasphématoires. En d’autres termes, tous ont été sous le feux des projecteurs de la commission de discipline de la Serie A pour avoir tenu des propos « insultants, méprisants ou qui manquaient de respect à la divinité ».

Des faits assez surprenants pour notre époque, et qui pourraient facilement prendre place dans une des nombreuses dystopies à la George Orwell, tant la liberté d’expression est de nos jours jugée comme fondamentale. Pourtant, en Italie et sur toutes les pelouses du Calcio, de plus en plus de joueurs se rendent coupables de ce genre de propos. Et se font ainsi reprendre par la justice du football italien. C’est le sujet de notre dossier qui s’ouvre aujourd’hui, avec une première approche sur le panorama législatif qui entoure le délit de blasphème de l’autre coté des Alpes.

En Italie, blasphémer est encore considéré comme un délit administratif

Il est donc toujours possible, en 2021 – au moment où l’humanité envoie des sondes sur Mars et déploie des vaccins à la technologie ARN à vitesse grand V – de se faire condamner pour avoir tenu des propos méprisants ou blessants envers tout ce qui touche au divin. Oui, la chose a de quoi surprendre et faire lever des sourcils. Surtout en France, où l’art du blasphème est érigé en coutume quasi sacrée et ultra représentative de la liberté d’expression (Charlie Hebdo, affaire Mila etc).

Pourtant, chez nos voisins transalpins, la donne n’est pas tout à fait la même. Pire encore, pour les joueurs de football italiens, le manque de respect envers les religions peut parfois coûter cher. Et ce n’est pas notre Gigi Buffon national qui dira le contraire. Lui qui est devenu la cible des autorités après avoir proféré des propos pouvant être jugés comme blasphématoires (suite à un enregistrement audio) lors du dernier déplacement de la Juventus à Parma.

Mais alors que dit la loi italienne à propos du blasphème ? Mépriser les dieux et le divin d’une quelconque manière est-il encore punissable par la loi ? Si la religion catholique n’est plus religion d’État en Italie, elle continue enfaite d’y jouer un rôle social et politique très important aujourd’hui. Et même si depuis 1999 le blasphème a été dépénalisé,  il constitue toujours un délit administratif à l’heure actuelle. « Toute personne qui jure publiquement, avec des invectives ou des paroles outrageantes, contre la divinité est punie de la sanction administrative allant de 51 euros à 309 euros » atteste ainsi la dernière version de l’article 724 du Code pénal italien.

Un délit oublié mais quelques fois réprimé…

L’Italie est donc une des rares grandes démocraties occidentales à disposer de tribunaux qui condamnent un citoyen pour blasphème. En 2015, à Milan, l’artiste Xante Battaglia avait par exemple exposé au centre de la ville trois photographies illustrant le pape Benoît XVI, son secrétaire Georg Gaenswein et un organe sexuel masculin entre les deux. Considérée comme très vulgaire et propice à la diffamation de la religion catholique, l’oeuvre avait du être retirée et Xante Battaglia se vit infliger une amende de 800 euros par la Cour suprême italienne.

Même son de cloche pour Nicolò De Paoli, ce jeune homme lambda de 27 ans, qui en 2017 posta une vidéo de lui sur Facebook dans laquelle il insultait l’armée des carabiniers et tenait des propos blasphématoires. 103 euros lui furent infligés pour ses blasphèmes exprimés en ligne. Plus gros encore, le 18 octobre 2014, le présentateur de télé Tiberio Timperi, lors de l’enregistrement d’une émission, a proféré un blasphème contre la Vierge lors de l’annonce d’un invité dans le studio. La chaîne de télévision reçu alors une amende de 25 000€.

Pour autant, malgré ces exemples connus, et même si en Italie le Code pénal contient plusieurs articles qui condamnent le blasphème, les sanctions ne sont cependant pas toujours appliquées. Comme c’est le cas à l’inverse dans le Calcio. Qui a fait des propos blasphématoires sa toute nouvelle passion.

… dont le Calcio en a fait sa nouvelle priorité

Depuis 2010, la fédération italienne a en effet durci le ton et rend passible de sanctions disciplinaires le blasphème ou tout autre propos portant atteinte à la divinité. Les arbitres peuvent ainsi décider librement d’exclure un joueur en cas de blasphème, mais c’est souvent la commission de discipline qui décide des sanctions après le revisionnage des images. Et depuis la pandémie de coronavirus et l’absence de tifosi dans les stades, pratiquement tout s’entend lors d’un match de Serie A. Et la fédération italienne prend un malin plaisir à sur-analyser et disséquer toutes les paroles d’un joueur pouvant être associée à un acte blasphématoire. C’est le sujet de notre seconde partie de ce dossier, qui arrive très rapidement

A lire aussi : 

1 – 1ere partie : Que dit la loi sur le délit de blasphème en Italie ?

2 – 2ème partie : Le délit de blasphème en Serie A 

3 – 3ème partie : Pourquoi l’Italie agit-elle ainsi ?




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Boris Abbate

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