Gigi Buffon, la crise de la quarantaine, ce n’est pas pour toi !
Dans le cycle temporel d’un sport, il y a toujours un joueur phare, celui qui marque une époque, celui qui marque une vie, celui qui marque un temps. La natation a eu Phelps, le rugby a eu Lomou, le tennis a (encore) Federer et le basket Jordan. Des noms qui dépassent la notoriété de la discipline dans laquelle ces champions intemporels ont joué. Pour le football, les 20 dernières années ont été marquées par un joueur, un homme, Gianluigi Buffon. Et ce n’est pas la multiplication des légendes en Italie lors des années 90-2000, qui malgré un choix difficile, empêchera le mythique gardien de but italien, de marquer les esprits et d’être considéré dans l’imaginaire collectif comme le footballeur parfait, l’homme parfait, celui qu’on aurait tant aimé voir soulever une Champions League ou aller en Russie cet été. Même pas pour son pays ou son club, juste pour lui en réalité. Car Buffon, c’est peut être aujourd’hui le seul joueur plus fort que son institution et que son pays. Une prouesse que ne sont pas parvenus à réaliser les Maldini, Zanetti, ou encore Del Piero et Totti. Car bien qu’aimés, jamais l’un d’eux n’obtiendra autant d’affection qu’un Buffon, qui dans son aventure, aura entrainé bien plus que les tifosi de son club ou de son pays. Buffon aura emmené tous les fans de foot à travers son histoire, son aventure, sa légende. Et comme l’explique à sa façon Valentin Pauluzzi, correspondant pour l’Equipe en Italie dans son article, il est le meilleur quadra italien !
La dramaturgie d’un parcours inégalable
Oui Buffon n’a pas (encore) remporté la Champions League. Et c’est d’ailleurs le seul trophée qui lui manque, en excluant un Ballon d’Or qui se refuse à lui, car depuis trop longtemps le football a basculé dans une nouvelle ère, moins humaine peut être, plus strass et paillettes sûrement. Mais ce sont bien ces histoires qui marquent la vie d’un footballeur. Celle de Gigi passe également par des déconvenues, parfois terribles. Cette séance de tirs au but en 2003 contre le Milan AC et ce regard impuissant sur le dernier tir de Shevchenko, cette finale pleine de souffrance en 2012 face à l’Espagne, ses pleurs en 2016 après la défaite contre l’Allemagne et ce tir au but qui lui passe sous les bras, tout comme ceux à San Siro après la double confrontation suédoise. Il y a aussi ces deux finales de Champions League perdues durement face à Barcelone et le Real Madrid. Face à deux joueurs qui n’auront eu de cesse de lui enlever sa dernière lubie, son dernier objectif. Il y aura aussi cette descente en Serie B en 2006 et son attachement au club. Une carrière de hauts et de bas qui ont attisé un sentiment fort d’appartenance de tous les fans de football dans le monde. Si aujourd’hui, le football et ses joueurs sont à part et qu’il est bien difficile de s’identifier à eux, Buffon reste encore à 40 ans l’exception, celle qui nous a accompagné dans tous les moments de notre vie jusqu’à aujourd’hui, dans les défaites, comme dans les victoires, que ce soit de la Nazionale ou en Europe avec la Juventus. Et très nombreux seront les supporters d’un autre club ou d’un autre pays qui souhaitent encore le voir soulever cette Champions League. Le constat est identique pour les joueurs. Il n’y a qu’à revoir les récentes déclarations de Rakitic sur la non participation du capitaine de la Nazionale à la Coupe du Monde en Russie, pour ne citer que lui.
Échecs sportifs oui, déconvenues personnelles aussi. Buffon c’est donc ce gars qui aurait pu être rongé par l’amertume de voir des trophées ou des records lui échapper, façon Ribéry 2013, mais non. Un peu de fatalisme, un zeste de réalisme mais surtout beaucoup de philosophie. Un côté terre à terre que personne ne pourra lui enlever et cette personnalité attachante, sur tous les fronts qui relie beaucoup de passionnés. Une force de la nature qui lui permet de surmonter tous les obstacles. Encore cette année, rien ne lui est épargné. Un mollet récalcitrant et plusieurs forfaits en Serie A. Une récupération plus longue qui lui enlèverait le record détenu par Maldini ? Qu’importe, Buffon est plus fort que ça et si l’annonce de sa retraite semblait être le coup de sifflet final d’une carrière somptueuse, ses récentes déclarations sont un peu la péripétie supplémentaire que tous désiraient. En route vers une prolongation ?
2006, à a jamais dans nos coeurs
Si la classe à l’italienne, l’image de marque et de modèle que Buffon peut dégager sûr et en dehors des terrains, il bénéficie également d’une côte de popularité gigantesque de par son succès en 2006 avec sa Nazionale face à la France. Alors que l’Italie était en souffrance, que le football italien connaissait les plus grosses secousses de son histoire récente, c’est lui qui dirige ce groupe vers la victoire finale avec des arrêts désormais plus célèbres que n’importe quel but marqué. A titre d’exemple, ceux face à l’Australie, l’Allemagne ou encore la tête face à Zidane en finale. Ce trophée, il est marqué de l’empreinte Buffon et c’est parce qu’en 1982 nous étions pour beaucoup trop jeunes (ou pas nés) que ce succès et ce personnage ont pris une importance autre. Alors oui le record de Zoff de devenir à 40 ans le plus vieux vainqueur d’une Coupe du Monde ne sera pas à portée, mais qu’importe. Buffon, pour les amoureux du foot en général, bien au delà du simple prisme de l’Italie, c’est Gigi, ce surnom que l’on pourrait donner à un ami. Et si pour beaucoup cet attachement pourrait sembler démesuré, le fait que chacun de ses arrêts, chacune de ses déclarations, ne laissent personne indifférents, semble démontrer une simple réalité. Gigi Buffon, c’est l’incarnation d’un football, celui qu’on aime, celui qu’on ne souhaiterait ne jamais voir partir. Et parce que beaucoup de nos idoles s’en sont allées ces derniers temps, Buffon est le dernier vestige, d’une époque dorée qu’on ne souhaiterait jamais voir s’effacer, le capitaine d’un navire qui tangue mais qu’il n’a jamais abandonné. Joyeux anniversaire Gigi et non, ne raccroche pas tout de suite, il y’a encore de belles histoires à écrire que nous pourrons alors raconter ensuite.
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