Milan AC : des finances dans l’œil du cyclone

La vision optimiste sur le futur du Milan AC reste de mise pour la direction du club. Il en est pourtant autrement des observateurs qui découvrent semaine après semaine de nouvelles raisons de s’inquiéter concernant le nouveau projet milanais. Depuis notre dernier papier sur le sujet début novembre, la situation a fortement évolué. En effet l’UEFA a refusé l’accord volontaire proposé par le Milan AC (voir ici) et plusieurs révélations ont éclaté dans la presse.

Zones d’ombres autour du rachat du club

Les mystères autour des investisseurs chinois et du rachat du club ne cessent de faire parler. C’est tout d’abord l’enquête du New York Times en novembre dernier qui jette le doute sur le sérieux du nouvel actionnaire principal M. Yonghong Li. Personnage quasi inconnu à l’international, il semble l’être également en Chine où il ne se distingue pas par sa fortune ou son sens des affaires. Censé être un leader du secteur minier, l’enquête démontre pourtant une société (Guangdong Lion) opaque, aux locaux vides et aux manœuvres douteuses. On apprend également que M. Li serait impliqué dans des histoires de litiges et de fraudes lors de ses précédents investissements. De quoi se questionner, donc, concernant l’achat d’un club aussi important et aussi cher dans les conditions rocambolesques d’alors. Optimisme et contre-attaque du côté de l’actionnaire où l’on peut encore se prémunir des accusations en invoquant la validation de l’opération à tous les niveaux (* voir le communiqué ci-après), à juste titre.

Une autre révélation explose dans la presse le 13 janvier lorsque La Stampa déclare qu’une enquête est ouverte par le parquet de Milan concernant le rachat du club en avril dernier. Le prix de cession aurait pu être volontairement surévalué pour blanchir de l’argent et le rapatrier en Italie. L’information est démentie par le procureur Francesco Greco le jour même. Néanmoins, pas de fumée sans feu, puisqu’il semble qu’un rapport de la police fiscale italienne ait bien été remis aux magistrats début décembre concernant la vente du club en y ajoutant des « signalements relatifs à des transactions suspectes » (plus de précisions sur leur site). Ce seront aux magistrats de décider s’il y a lieu d’ouvrir une enquête en temps voulu, mais là encore rien n’est fait pour l’instant. M. Berlusconi, ancien président du club, n’a pas hésité à parler de manœuvres politiques pour le déstabiliser lors de sa campagne actuelle.

* Le communiqué du président du club, M. Yonghong Li en réponse aux révélations dans la presse :

« Le processus d’achat du Milan AC a toujours été réalisé avec la plus grande transparence, le respect des règles et de la sincérité, toujours avec le soutien et les conseils de conseillers financiers et juridiques internationaux. Toutes les procédures ont été suivies en totale conformité avec les lois et pratiques en vigueur. Toutes les institutions financières, les organisations sportives et les autorités concernées ont reçu la documentation requise pour évaluer et approuver le processus de clôture et les qualifications de la nouvelle propriété qui gère actuellement l’équipe. Ce que j’ai lu ces jours-ci ne reflète absolument pas la réalité des faits. Par conséquent, considérant le groupe que je préside AC Milan S.p.A. et moi-même comme parties lésées de cette campagne médiatique regrettable et inacceptable basée sur des spéculations et des informations trompeuses, nous nous réservons le droit de prendre toutes les mesures légales nécessaires pour protéger l’image. »

Une situation financière à régulariser au plus vite

Si les dirigeants peuvent encore jouer la carte de la tranquillité du côté du rachat, la question du remboursement de l’emprunt colossal de 303M€ (et des 50M€ d’intérêt) au fond d’investissement américain Elliott nécessite des garanties rapides. La date de remboursement butoir prévue pour octobre 2018 incite la direction à rechercher comment refinancer la dette. Cela revient à emprunter la somme à un autre organisme pour étaler le remboursement et limiter l’impact des taux d’intérêt hallucinants du premier accord (11% sur certaines tranches). Les dernières tendances évoquent une proposition de la banque américaine Jefferies sur ce sujet après que les discussions avec le fonds Highbridge aient échoué. L’objectif de Marco Fassone serait alors de rembourser l’argent au fonds Elliott d’ici mai 2018 pour rassurer les investisseurs, mais aussi et surtout l’UEFA.

En effet son refus concernant l’accord volontaire proposé par le Milan AC entraînera d’ici le mois d’avril une nouvelle phase de négociation où le club devra démontrer une fois encore la fiabilité du projet. Sauf revirement, la commission imposera alors des conditions strictes à la direction afin de garantir un retour à l’équilibre financier sur les prochaines années. Des sanctions et mesures pourraient être prononcées : cap salarial, limitation sur la liste des joueurs inscrits en coupe d’Europe, limitation des transferts… On parle dans ce cas d' »accord de règlement », l’Inter et la Roma ont par exemple signé de tels accords. La possibilité d’être exclu des compétitions européenne reste mineur jusqu’à présent puisque toute une gamme de sanctions et d’amendes est prévue avant cette décision.

De nouveaux partenariats

Du côté des revenus, de nombreux contrats commerciaux ont été signés avec de grosses entreprises et notamment Asiatiques en cette fin d’année. C’est ainsi qu’un accord longue durée a été trouvé avec Vwin, leader des paris sportifs asiatiques mais aussi avec AlpenWater. Un nouveau partenariat important est également en train d’être réalisé puisque Puma va devenir le nouveau sponsor technique du club à partir de l’année prochaine et remplacer Adidas après 20 ans de collaborations. Ce changement de sponsor entraînera une légère baisse des revenus comparativement à ce qui était prévu avec Adidas puisque le montant sera de 15M€ par saison contre 20M€ auparavant.

Le directeur commercial du club, Lorenzo Giorgetti, présentant le nouveau partenariat pluriannuel avec Vwin, leader des paris en ligne asiatiques

Au-delà des affaires et des polémiques, pour l’instant sans effets, c’est sans doute l’image du club qui en pâtit le plus. Le rachat devait permettre de repartir sur de nouvelles bases, en renouant avec l’Europe et en développant une économie forte grâce au marché asiatique. Pourtant, loin d’être irréprochable sur le terrain, le Milan AC se montre également brouillon en coulisse en traînant ses doutes derrière lui. L’épilogue de ce feuilleton se rapproche à grands pas car si les dirigeants arrivent à passer l’été sans encombre, le plus dur sera sans doute derrière eux.

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