Milan ne se fera pas en un jour !
« Ce Napoli qui vient de nous battre est plus fort que le Milan AC d’Arrigo Sacchi« . Pour défendre ses jeunes successeurs, Massimo Ambrosini le magnifique a décidé de ne pas y aller de main-morte. Certainement car l’ancien capitaine, tout prédateur qu’il fut sur le terrain, se transforme en proie devant les caméras. Il flaire le danger. Il anticipe les coups. Il sait, au fond, qu’ils sont nombreux, ceux qui attendaient depuis plusieurs mois de pouvoir hurler au sur-régime, au « coup de chance » conjoncturel qui ne signifiait en rien le retour des Rossoneri. Après l’élimination brumeuse en Coppa Italia face à une Juventus pourtant battue deux fois cette année, ces derniers n’ont évidemment pas manqué l’occasion. Il paraît donc intéressant, avec le recul somme toute délicat de trois matches globalement décevants, de prendre de la hauteur. Il est même absolument salutaire de se départir de cette masse grouillante d’esprits chagrins, de critiques du dimanche, d’adversaires résolus de toute objectivité et de toute pensée critique en matière de football. En rappelant une première évidence, factuelle : oui, le Milan AC est en train de ralentir dans sa saison.
Une baisse de régime aussi réelle qu’à relativiser
Reconnaissons d’abord le caractère exceptionnel de cette première partie de saison. Le Milan AC a trusté la troisième place pendant 8 journées de rang, et chaque observateur attentif du club lombard depuis trois ans ne peut que constater le progrès comptable que cela constitue. Qu’un club présumé en état de mort clinique se renouvelle avec autant d’aplomb confine d’ailleurs au miracle. Mais, fatalement, une telle série de résultats positifs, à ce moment de la saison, attise les rancœurs et les souvenirs douloureux de ceux qui préfèreraient ne pas voir le Diavolo ressortir de la boîte dans laquelle on l’avait rangé. Ainsi, l’actuelle passe – incontestablement médiocre – des Milanais conduit nécessairement à des conclusions aussi hâtives que discutables : Milan est 7ème après la 21ème journée, encore moins bien qu’avec Sinisa Mihaljovic l’an dernier (le club était alors sixième) ! Tant de supporters adverses et même de journalistes ont cru bon d’écrire cela comme une vérité à la fois révélée et révélatrice. Sauf que la septième place de 2017 est bien plus souhaitable que la sixième en 2016. Le Milan AC comptait alors 32 points, contre 37 aujourd’hui avec un match de retard. Surtout, l’équipe reste dans la roue d’une lutte pour le haut du tableau, ce qui n’était plus le cas en 2016. Mais plus encore que par des calculs d’apothicaire, il convient surtout de rejeter l’idée selon laquelle le retour d’un club se joue sur une poignée de matches.
Evolution du classement milanais cette saison (source: Transfermarkt)
La vérité sur le retour du Milan AC
N’oublions pas que l’on parle d’un club qui a fait rêver des générations entières, qui a tout gagné, qui a été pendant plusieurs années le club le plus titré de l’histoire du football mondial. Sa reconstruction ne peut pas être et ne sera pas immédiate. On ne se lèvera pas un matin avec un Milan AC revenu au niveau de celui des années 90 ou des années 2000. Le Milan AC des années 2010 est encore à construire, et même si le temps presse, les jalons sont aujourd’hui posés. Les fondations sont là. D’abord, parce que le jeu est de retour, et que les créateurs sont plus que jamais à l’honneur. Ses deux maîtres à jouer, Suso et Giacomo Bonaventura, sont les deux joueurs de champ les plus utilisés par Montella, avec respectivement 1995 et 1848 minutes de jouées cette saison. Cette omniprésence de ces deux joueurs explique aussi la méforme de janvier. L’émousse des deux hommes sur le plan physique, plus que probable en l’absence de remplaçants valables, crée aussi le déséquilibre. C’est aussi le retour des révélations : de Donnarumma à Locatelli en passant par Calabria et bientôt Cutrone, la jeunesse italienne triomphe du côté de San Siro. C’est à la fois un signe d’excellente santé de la formation, mais aussi du club tout entier qui s’est donné structurellement les moyens de donner sa chance à sa jeunesse. Retenons enfin la hausse très nette de l’affluence, avec une moyenne passée en une saison de 37.800 spectateurs par match à 42.400 aujourd’hui. La preuve que le plaisir de regarder du beau football en rouge et noir est de retour, ce qui peut décupler les efforts de chacun.
La séance de tirs au but qui aura tout changé ? (Finale de la Supercoppa)
Attention aux grands virages !
Pour autant, s’il a été démontré toute la vacuité d’un discours fondé sur le refus de concéder un retour en grâce du Milan AC, il est tout aussi absurde et nocif de se dire que tout est joué, que le boulot est fait. Car, du côté de la Casa Milan, plusieurs dossiers sont en cours et pourraient sceller dans un sens ou dans l’autre le destin du club. On peut en retenir trois principaux : la vente définitive du club, bien sûr, et ce qui sera engagé en terme de réformes structurelles par la suite. Il est évident que dans un marché aussi grotesque que celui de notre temps, l’argent frais commence à manquer. Idem pour le classement final 2016/2017: une absence de qualification européenne, même en Europa League, serait un authentique coup dur dans la dynamique de reconstruction. Enfin, le capitaine du navire, Vincenzo Montella, est un homme à suivre. Il a insufflé ce qui manquait depuis si longtemps à ce club, et sa confirmation voire son ancrage pour un « cycle » complet serait un gage de stabilité comme de talent. Tout l’intérêt d’un observateur à la fois objectif et attentif est maintenant de veiller à cette évolution. Mais rien n’interdit de rêver, bien au contraire.
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