Et nos idoles s’en sont allées
Le football des années 90 tire sa révérence et tire par la manche le petit frère des années 2000. Petit à petit, les légendes du passé laissent place à un nouveau football. Seule la nostalgie de ces années dorées durera, toujours un peu plus forte à chaque départ.
« C’était un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre » : ou plutôt, les moins de vingt-cinq ans si l’on veut être précis. Précis comme une longue ouverture de Pirlo, comme une frappe de Kaka ou un lob de Totti. Des noms fascinants qui n’auront de cesse de résonner dans la mémoire de ceux qui, comme beaucoup, se sont épris du football dans les années 90-2000 en France avec en apothéose la Coupe du Monde 98 disputée dans l’hexagone et remportée par le pays hôte, ou encore l’Euro 2000 et le Mondial de Ronaldo, celui de 2002 avec son doublé en finale. Et ce sont ces même personnes – appelées « Footix » en référence à la mascotte de la plus grande compétition, dont le pseudonyme est dorénavant plutôt utilisé pour désigner ceux qui « n’y connaissent rien » – qui ont grandi dans ce qu’on pourrait appeler l’Eldorado du football moderne. Une période faste avec des génies et des histoires qui n’auront de cesse de faire briller les yeux de bon nombre de gamins aujourd’hui, qui plus est du côté de l’Italie.
Des génies qui malheureusement raccrochent les crampons petit à petit et qui rajoutent coup sur coup, des maux terribles aux amoureux du ballon rond ; mais pas le Ordem de Nike, plutôt le Tricolore d’Adidas contrôlé avec amour par Denis Bergkamp face à l’Argentine et repris victorieusement par deux fois par Thuram, Zidane ou encore Beckham, Vieri, Inzaghi : ils sont tellement à l’avoir caressé. Il y a aussi le Questra de 1994, celui qui brille dans les cieux de Californie après le tir au but manqué de Roberto Baggio (une autre légende soit dit en passant). Une période où les maillots trop larges, bien rentrés dans le short, aux couleurs douteuses étaient légion, une période où les crampons les plus classes étaient noirs. Mais si, vous vous souvenez forcément des « Predator Accelerator » de Zizou ou encore de la hype de la « Total 90 » de Nike, celle avec laquelle vous trouviez avoir « une meilleure frappe de balle » qu’avec vos Kipsta sur le synthétique pourri à côté de la piscine communale.
La fin d’une époque
Et oui amis bientôt trentenaires, ou trentenaires révolus d’ailleurs, le football des années 90-2000 se retire petit à petit du pré. 2017 en est d’ailleurs un témoin à la fois privilégié et cruel, puisque du côté de l’Italie, trois départs ont marqué les esprits, et non des moindres. Il y a eu Totti au mois de juin, Pirlo ce week-end. Deux noms de légende qui avaient crevé l’écran en 1993 et en 1995 lors de leurs premières apparitions. Si pour l’un, l’histoire fait désormais le tour de Rome comme un char de guerre faisait celui du Colisée autrefois, l’autre a eu un parcours plus tumultueux mais n’en demeure pas moins un des plus talentueux joueurs de football de sa génération. A ces deux départs, il faut en rajouter un troisième, celui de Ricardo Kaka, autre idole de l’Italie du foot. Le Brésilien, Ballon d’Or France Football en 2007 et vainqueur de la Coupe du Monde 2002 et d’une Champions League (avec Pirlo d’ailleurs). C’est un autre symbole des années 2000 qui part, comme pour tourner la page d’un football qui vit désormais avec son temps, un autre temps qu’il faut accepter, parce que le monde change, parce les gens changent, parce que le tifoso enfant des années 90-2000 est désormais un adulte qui appréhende différemment le milieu du ballon. Les cartes Panini et l’admiration pour les retournées de Djorkaeff, les coups francs de Recoba, les buts somptueux de Shevchenko ou Del Piero, les chefs d’oeuvres éphémères d’Adriano ont laissé place à une analyse plus froide et lucide sur les réalités du monde du football. Des réalités économiques qui sautent au yeux avant tout, qui existaient déjà bien avant qu’on ouvre nos oeillères d’adultes, mais que l’on accuse malgré tout de la mort de nos idoles. Car c’est bien un deuil qu’il faudra faire. Celui de ne plus revoir certains noms : Maldini, Zanetti, Grosso, Totti, Pirlo, Kaka, Recoba, Seedorf, Inzaghi, Del Piero, Nedved, Vieri ou encore Nesta et Cannavaro. Quelques noms qui résonnent encore au panthéon du foot et dont les images des exploits resteront gravées dans les mémoires de tous, aigris ou non.
Et maintenant que reste-il ?
Si beaucoup de cette génération se plaignent de n’avoir jamais vu jouer Maradona ou Pelé, ils seront les témoins d’une époque dorée qui a vu le football briller de mille feux du côté de la Botte, dépasser les réalités économiques et parfois moroses d’un monde qui n’est pas celui des mythes et des légendes, mais bien celui de l’argent et de l’égo. C’était une époque où nous (ou vous), jeunes astronomes, ne nous lassions jamais d’observer les étoiles filantes qui naviguaient sur les gazons d’Europe et du monde entier. Des étoiles que l’on croyait garder sous les yeux toute notre vie, mais qui désormais s’évaporent pour ne laisser que des souvenirs. Des souvenirs qui deviendront des histoires, à raconter et à transmettre, car au delà des vidéos sur le Net, le contexte dans lequel nous les avons vécu vaut tout l’or du monde et rien ne pourra jamais mieux retranscrire un passement de jambes de Ronaldo en finale de coupe UEFA ou une séance de tirs au but mythique de Toldo contre les Pays-Bas que celui qui était devant son poste (ou au stade) à ce moment là. Certains se plaignaient de n’avoir jamais vu Maradona ? D’autres se plaindront de n’avoir jamais connu les Zanetti, Maldini, les Pirlo. Dans 20 ans, 30 ans, ce football là aura disparu totalement des écrans, mais restera grâce aux témoins de cette époque, le plus beau football pour ces vingt-trentenaires, un football qui fait partie d’une jeunesse insouciante, peut être désormais révolue. Et c’est ce qui fera le charme des histoires du football des années 90-2000 dans les futures années à venir que vous raconterez, que nous raconterons. Et peut être que dans une vingtaine d’années, un autre prendra la plume pour raconter lui même son témoignage sur les années 2010-2020. Un football que nous voyons pour beaucoup comme différent et dénué d’intérêt : « plus assez populaire » qu’ils disent. Mais pourtant ce sont toujours les même enfants qui rêvent de ressembler à leurs idoles que l’on voit courir dans la rue et dans les stades de la Mairie, des idoles dont seuls les noms ont changé aujourd’hui, mais pour qui la ferveur reste intacte et semblable à celle d’autrefois.
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