C’est à Zanica que Calciomio avait rendez-vous avec Anthony Taugourdeau, milieu de terrain marseillais exilé à l’Albinoleffe, en effet le centre d’entrainement se trouve à la sortie de cette petite bourgade. Un petit coin de paradis immergé dans la quiétude de la campagne bergamasque.

Raconte-nous ton parcours en France avant de débarquer en Italie.

J’ai commencé à jouer au foot à l’age de 5, 6 ans à Marseille après j’ai déménagé et joué à Aubagne, puis j’ai fait un an de centre de formation à Martigues et enfin Cannes avec les 18 nationaux. Un agent italien est venu me voir jouer le dernier match de championnat et il m’a emmené passer un essai à la SPAL en C2 l’été 2008 sauf qu’ils ont été repêchés en C1 durant la préparation estivale et donc l’entraineur m’a dit que j’étais trop jeune pour rester dans un groupe pro. Mon agent m’a ensuite emmené à Pisa où son ami entrainait la Primavera et j’ai signé, je me suis entrainé deux mois avec les jeunes, puis j’ai de suite été intégré au groupe pro en Serie B.

Tu avais des atomes crochus avec le football italien dans ta jeunesse ?

Je regardais l’équipe du Dimanche comme tout le monde, avec tous les championnats européens, mais jamais j’aurais pensé faire ma carrière ici.

Et d’ailleurs, comment se passent tes débuts en Italie ?

Les 2,3 premières semaines c’était pas facile, j’étais tout seul avec que des Italiens, y’a même eu un moment où j’ai voulu rentrer chez moi et tout arrêter. Après mes parents – qui ont tout fait pour que je réussisse – sont venus me voir en Italie, ça m’a fait du bien et je me suis habitué petit à petit.

Tu te souviens qui tu remplaces pour tes débuts pros le 1^er Novembre 2008 lors de Bari-Pisa ?

Birindelli ! C’était un grand champion, d’une année sur l’autre ça m’a fait bizarre de jouer avec de tels joueurs.

Tu côtoies aussi un certain Bonucci à cette époque

On a passé six mois ensemble, on voyait déjà que c’était un joueur serein, tranquille et qu’il avait des grosses qualités.

Et surtout Gaël Genevier, LE joueur français qui sait tout du football italien

Oui je restais avec lui et deux camerounais Thomas Job et Patrice Feussi, il m’emmenait aux entrainements, il m’a aidé à m’intégrer.

Malheureusement Pisa enchaine relégation et faillite.

Moi j’étais jeune, je savais pas trop comment ça se passait chez les pros. Mon agent m’a tout de suite trouvé un club, Carpi, alors en Serie D. Descendre de trois divisions était peut-être un mal pour un bien, car je repars direct en Serie B l’année suivante, donc je ne regrette pas. Là-bas j’ai même rencontré ma femme. En revanche en finale des play-off, on gagne 5-0 chez nous et on perd 8-2 au retour à Pianura, un terrain de quartier de Naples, c’est comme jouer dans les quartiers Nord de Marseille, c’est pas facile du tout pour une équipe du Nord de l’Italie pas habituée à ce genre de match !

C’est la saison où tu exploses.

J’ai marqué 11 buts dont 5 sur coups-francs en une trentaine de matches, ça m’a permis de me mettre en valeur. Je jouais milieu gauche dans un 442, à Cannes je jouais aussi à droite, mais en arrivant à l’Albinoleffe, j’ai été replacé dans l’axe car il y a des joueurs plus rapides et physiques pour ce poste à ce niveau et la rapidité n’est pas forcément mon point fort, mais je me sens bien en milieu centre. Carpi est maintenant en Serie B, il ne reste qu’un joueur de l’époque mais je suis content pour eux.

C’est donc à l’été 2010 que tu signes à l’Albinoleffe.

J’étais encore jeune, il y avait une équipe expérimentée, j’étais avec le groupe pro entrainé par Mondonico mais je n’ai pas beaucoup joué et j’ai donc été prêté à Prato en 2^ Division de Lega Pro. Ça ne s’est pas très bien passé, j’ai été blessé à mon arrivée, je reviens et je chope une infection broncho-pulmonaire, hop, deux mois dehors, j’ai raté la plupart des matches. Après je suis revenu à l’Albinoleffe, mais c’était difficile dans la foulée du Calcioscommesse, on n’a pas réussi à se maintenir, ça fait partie des expériences.

Finalement cette relégation c’est un mal pour un bien te concernant ?

Oui on se retrouve en Lega Pro et du coup j’ai joué plus, on avait la pénalité – 27 points, -10, puis finalement -6 qui nous coûte tout de même les play-off, on serait arrivé 3ème sans. Le club s’est remis sur de bons rails, cette année il n’y a pas de descente, les huit premiers participent aux play-off. Il faut bosser, bosser et on y croit.

Tu confirmes que l’Abinoleffe c’est la réincarnation de la quiétude ?

Tout à fait, on peut travailler tranquillement, sans pression, c’est une ambiance qui me correspond, on peut bien progresser. C’est un club qui n’est pas trop connu pour son public, puisque bien éclipsé par l’Atalanta, on a quand même nos supporters et on compte sur eux. Le centre sportif est ici à Zanica, il y a 5, 6 terrains d’entrainement, à ce niveau pas beaucoup de clubs peuvent se vanter d’avoir de telles infrastructures. Je suis maintenant un des cadres de l’équipe, j’ai beau être né en 1989, je suis le troisième plus âgé, truc impossible en France. Ça fait quatre ans que je suis là, les responsabilités arrivent et c’est normal.

Tu es en train de construire ta vie privée également

J’ai un petit garçon de trois ans, ma compagne vit avec moi à Bergame, ma vie est maintenant en Italie. Je ne me vois pas quitter ce pays, en France j’y vais pour Noël et l’été juste pour la famille, mais ça ne me manque pas plus que ça.

Et c’est quoi le projet avec le fiston ?

Il parle italien mais il comprend le français… et je pense qu’il supportera l’Italie plus tard !

Ça fait cinq ans que tu es ici, tu peux bien trouver une qualité et un défaut de ce pays.

Le mode de vie des gens, tranquille, pas agressif, ici une fille peut sortir tranquillement à minuit, il ne lui arrivera rien, en France je ne suis pas si sûr. En revanche, la conduite des Italiens c’est quelque chose.

Question subsidiaire pour finir, t’es plus Albino ou Leffe ?

Ça faut demander aux supporters, moi je suis Marseillais !

crédits photos : www.albinoleffe.com