Le procès en appel de Calciopoli entre dans le vif du sujet en ce mois d’octobre après plusieurs reports pour de multiples raisons (grève des magistrats, défaut de notifications) il y a quelques mois qui n’ont pas empêché à tous les accusés de renoncer à la prescription. La réelle réouverture de ce procès s’est donc déroulée il y a deux semaines, avec les déclarations spontanées des accusés, seul Pierlui Pairetto, l’un des deux désigneurs arbitraux de l’époque s’est exprimé, il a pratiquement attaqué une à une les théories souvent fragiles de l’accusation et pour certaines démontées en première instance. Un rappel utile.

Le tirage au sort “Comme il l’a été démontré dans le procès, il était impossible de le fausser, nous avions deux urnes transparentes avec un notaire au centre, j’extrayais les boules concernant les matches, et un journaliste celle de l’arbitre. Les boules bosselées ? Elles l’étaient toutes. Le tirage pouvait être truqué seulement si le journaliste, qui changeait à chaque tirage et était désigné sans que nous le sachions, était d’accord avec nous.”

Les grilles “J’en parle car une fois que le procureur de la république a vu que son accusation sur les tirages ne fonctionnait pas, il s’est concentré sur les grilles. Et bien il y en avait trois, et elles étaient divisées en fonction de l’importance des matches. Nous, toute l’année on a mis Juve, Inter et Milan dans la grille la plus importante, et de temps en temps, on y ajoutait certains matches importants selon les antécédents, si c’était des derbys etc… Dans la première grille, nous avons utilisé seulement 10 arbitres internationaux et 4 qui ne l’étaient pas mais qui avaient dirigé plus de 100 matches en Serie A. Il faut savoir que les arbitres avaient des interdictions, ne pas arbitrer une équipe de la ville où ils habitent, ou ils travaillent, ne pas arbitrer plus de six fois la même équipe dans une saison (critères encore valables aujourd’hui ndlr), donc les grilles étaient presque obligatoires et même les choix. Leur composition était un secret de Polichinelle, presque tout le monde réussissait à les deviner avant le tirage. Par deux fois seulement, il y a eu un nombre limité de matches, le premier fut Roma-Juve et puis Milan-Juve, en cette occasion seuls Collina et Paparesta pouvaient arbitrer le match. C’est également la fois où les carabiniers sont venus filmer, une preuve que l’on a pas vu car le procureur l’a retirée au dernier moment, on a seulement vu des photos dont la chronologie a été inversée de façon – j’espère – non voulue.”

Les discussions “Nous avions des contacts avec tous les dirigeants, de toutes les équipes, du Chievo au Napoli, de la Lazio au Milan, de l’Atalanta à Messina. Des personnes avec qui nous parlions normalement des grilles, on en parlait même avec les journalistes qui disaient que s’ils avaient le moindre doute, ils en auraient fait le scoop de leur vie. Une fois Facchetti avait dit à Bergamo de mettre dans une grille trois arbitres dont deux avec des interdictions, mais il le faisait car il voulait Collina dans un Inter-Juve, rien d’anormal ni de dramatique. D’ailleurs, ce match fut attribué à De Santis, ennemi publique de l’Inter mais qui gagna le match. La fédération ne nous interdisait pas ces rapports avec les dirigeants, elle nous encourageait. Carraro (président de la FIGC à l’époque ndlr) nous avait demandé de faire des articles le lundi sur la Gazzetta dello Sport. Je n’ai jamais rien écrit même s’il y avait ma signature, sauf une fois et cette fois là la Gazzetta n’a pas voulu le publier parce qu’il n’y avait pas de remarques faites aux arbitres.”

La gestion des arbitres “Nous commentions les épisodes de chaque match à Coverciano pour faire progresser les arbitres, dans le procès, on leur a demandé si quelqu’un leur avait dit quelque chose pour les influencer. Et tous, y compris Nucini (le fameux cheval de Troie de l’Inter ndlr), ont répondu non. J’ai toujours critiqué le système du tirage au sort et les grilles, car c’est la négation de la progression d’un arbitre. C’était une inconnue qui ne servait à personne et créait des tensions. L’accusation dit que nous punissions ceux qui défavorisaient la Juve et que l’on récompensait ceux qui la défavorisaient. C’est une accusation folle et je vais l’illustrer en trois cas. Paparesta après un Reggina-Juve suite auquel il y au beaucoup de polémiques, Juve désavantagée sans aucun doute. Lui six jours plus tard, il arbitre le match le plus important de la Serie B et dix jours après un match international, deux semaines plus tard il est dans la grille d’Inter-Juve. Si c’est une punition…Ensuite Racalbuto après Roma-Juve : nous ne pouvions pas mettre Collina car il avait arbitré le mardi en Europe. Ce fut un match disons “pro Juve” au vu des erreurs arbitrage. On a suspendu Racalbuto pendant 9 matches. Le dernier: Pieri après Bologna-Juve; “pro Juve” pour un coup-franc à 30 de mètres du but de Bologna qui amène lu but. Critiques folles, Pieri ne fut plus mis en première grille pendant le reste de l’année et le match était début décembre ! Si vous pensez qu’après nous il y a eu Collina qui avait la possibilité de désigner les arbitres….Bergonzi qui arbitra un Napoli-Juve très contesté, arbitra de nouveau la Juve seulement trois ans plus tard!”

Ses rapports “Je voudrais parler des dîners avec les dirigeants, mon amitié entre Moggi et ma famille date de l’époque de mon père qui était ami de Moggi lorsque ce dernier était dirigeant du Torino. C’est une fréquentation qui a eu lieu bien avant que je sois moi-même arbitre de Serie A. J’ai une amitié avec Giraudo depuis l’université. A nos repas, femmes et enfants étaient toujours présents. Je n’ai jamais reçu de cartes sim étrangères de la part de Moggi. J’en ai utilisé mais c’est l’Uefa qui me les avait données pour mes fonctions au sein de la fédération européenne. Je ne sais pas d’où naissent les contacts qui me sont attribués de la part de quelqu’un qui a rédigé le tout à la main. Cette amitié avec Luciano date de 30 ans. Enfin je veux vous rappeler qu’en six ans en tant que dirigeant de la Confédération des Arbitres, les championnats ont été gagnés par la Lazio, la Roma, le troisième l’Inter l’a perdu (la fameuse défaite 4-2 Rome ndlr), le quatrième la Juve, puis le Milan et encore la Juve.

A venir, les déclarations de Diego Della Valle de mardi dernier. Enfin pour plus de précisions sur cette affaire, vous pouvez consulter le dossier à cette adresse.