Entretien exclusif avec Matthias Lepiller : de la Fiorentina à Novara en passant par le Hellas
Entretien exclusif avec Matthias Lepiller : de la Fiorentina à Novara en passant par le Hellas
Calciomio avait pris rendez-vous à Novarello, bijou de centre d’entrainement de l’équipe de Novara (Serie B) où évolue Matthias Lepiller. Cet attaquant français de 25 ans a débarqué en Italie en 2006 à la Fiorentina et il nous raconte son parcours, sans langue de bois.
Commençons par ta formation en France
Je suis né à Gainneville et j’ai joué dans un petit club à côté de chez moi à Confreville, avec les débutants on a rencontré et battu Le Havre en demi-finale d’un tournoi, j’avais marqué et bien joué. Après la rencontre les dirigeants du Havre ont appelé mon père pour savoir si j’étais intéressé, et de mes 8 ans jusqu’à mes 18 ans, j’étais au HAC où j’ai fait toute ma formation.
Parallèlement, tu fréquentes aussi les équipes de jeunes françaises
J’ai fait les U15, U16, U17, ça s’est toujours bien passé, mais à partir du moment où je suis parti en Italie, ils m’ont clairement dit que si je ne jouais pas en Serie A, ils ne pouvaient pas m’appeler. J’ai fait les qualifs d’un Euro en Turquie, dans cette génération, il y avait Johnny Placide, gardien remplaçant à Reims aujourd’hui.
Pourquoi tu quittes Le Havres si jeune alors ?
A un moment, ils ont changé le directeur du centre de formation qui était aussi entraineur des -18/CFA, à l’entrainement, dès que je ratais une passe ou un contrôle, il me faisait faire des tours de terrain. Il m’en demandait beaucoup trop, il croyait en moi mais il s’y est mal pris. Il m’engueulait tout le temps. Le premier rassemblement, c’était avant un tournoi, moi j’avais toujours été titulaire, j’ai jamais eu de problème et il convoque tout le monde sauf moi. Là je me suis dit qu’il y avait un soucis, et ça a duré pendant une saison avec que des embrouilles. Au bout d’un moment, je me suis dit que ça ne servait à rien de rester ici, d’autant que ce coach a pris l’équipe première ensuite, donc moi je devais passer pro je savais comment ça allait se passer avec lui. La réglementation française veut que tu signes ton premier contrat pro dans le club qui t’as formé ou alors à l’étranger. C’est pour ça que je suis parti principalement, sinon je restais volontiers en France, si ce mec là n’était pas arrivé, je restais au Havre, avec ma famille et j’y faisais peut-être ma carrière. J’ai encore des regrets de ne pas avoir percé là-bas.
Quelles étaient tes opportunités à l’été 2006 ?
J’avais deux contrats sur la table, Liverpool ou la Fiorentina. Mais les Reds, c’était l’époque où ils faisaient des finales de Champions League, etc…j’me suis dit que je ne jouerais jamais là-bas. En revanche, la Fiorentina venait de remonter en Serie A depuis deux ans, là je pouvais jouer ma carte, même si ça n’a pas été le cas, puisqu’au final à part quelques présences sur le banc de touche, je n’ai pas joué.
Tu avais une attirance pour le football italien ?
Non non, le pays qui m’attirait le plus moi c’était l’Espagne, ça me faisait plus rêver. L’Angleterre et le côté physique m’effrayait un peu. Mais je ne pensais pas à l’Italie, d’ailleurs Florence, c’était mon premier voyage là-bas.
Comment ont réagi tes parents ?
Ils étaient contents mais ils avaient un peu peur, c’était dur pour eux car ils se disaient “déjà il est en centre de formation, on ne le voit pas beaucoup, maintenant qu’il va à l’étranger on ne va plus le voir”. Mais à l’heure d’aujourd’hui, ils sont contents parce que je réussis à faire quelque chose, même si c’est pas encore ce que je voudrais, mais je gagne bien ma vie. Quoi qu’il en soit, ils m’ont conseillé mais au final ils m’ont toujours laissé faire mes choix.
Comment se passe ton arrivée en Italie ?
Au début je suis complètement dépassé, j’arrive à la Fiorentina, on va faire le stage de préparation avec Prandelli comme coach, j’avais 17 ans avec mon petit bagage, Sébastien Frey m’a aidé au début, il traduisait tout. Physiquement, j’étais à la rue, même les petits matches d’entrainement, je me suis dit que j’allais jamais y arriver. Ensuite, petit à petit avec le temps, tu prends le rythme et tu parles un peu la langue. Durant la saison, je m’entrainais avec l’équipe pro et le week-end j’étais reversé, mes coaches en Primavera était Cadregari et ensuite Bollini qui a gagné le scudetto de la catégorie avec la Lazio en juin dernier. On était de partout, deux tchèques, trois ou quatre brésiliens, un autre français, j’ai beaucoup appris tactiquement pendant mes deux années dans cette catégorie, comme j’aurais jamais appris en France. Ici, on te fait parfois rester 2,3 heures sur le terrain pour assimiler des schémas de jeu.
Les problèmes concernant ton transfert ne t’ont pas gêné ?
Avant de signer, je les ai prévenus, je leur ai dit, je veux pas de problèmes, je veux pas payer des amendes. J’ai du attendre deux mois pour la validation de mon transfert, et ils ont payé l’indemnité de formation, je crois que c’était 600.000 €. Mais moi j’ai toujours été serein, ils se sont occupés de tout et m’ont toujours rassuré.
Deux ans seulement après ton arrivée dans la botte, tu la quittes déjà
Après deux ans de Primavera, j’avais 19 ans, j’avais fait mes armes, on m’a fait comprendre que c’était compliqué de rester, la Fiorentina voulait que j’aille faire un an en prêt et revenir plus mûr. Je suis parti au Grasshopper, pendant 6 mois, mais ça s’est mal passé, avec l’entraineur ça allait pas. J’étais pas dans ses plans, déjà j’arrive fin aout et la saison était commencée depuis un mois et demi, donc il avait déjà son équipe, ça tournait bien et j’ai pas joué beaucoup. Au mois de janvier je me suis dit qu’il fallait que je joue, j’allais pas rester un an à regarder les autres. Et là je suis parti à Eupen en D2 belge via un agent italien, j’arrive, ils ont un point, ils vont descendre, ils ont monté une équipe de jeunes avec des prêts italiens et suisses et ça s’est super bien passé. J’ai joué tous les matches, marqué 5,6 buts et on s’est sauvé tranquillement. L’année d’après, l’équipe est restée la même, on est monté mais on redescend directement. Moi j’y serais resté, j’étais bien, mais le truc c’est que c’était des investisseurs italiens et le problème c’est qu’ils payent pas. Ils signaient des contrats mais ne les respectaient pas. Je suis encore en procès, ils me doivent 100.000 €, mais là ils ont fait faillite, ce sont des qataris qui ont repris et qui ne veulent pas payer les anciennes dettes. Ça va prendre du temps, mais je vais récupérer mon argent, peut-être pas tout, mais je vais le récupérer. Au début, le temps de me relancer, je disais trop rien, mais au bout d’un moment, tu peux pas vivre en étant payé une fois tous les cinq mois.
Quand tu quittes l’Italie, tu n’avais pas peur de disparaitre des radars ?
Oui et non, d’abord les Grasshoppers c’est quand même une grosse équipe, j’me suis dit si je joue les premiers rôles, ça peut décoller. Mais en allant en Belgique, j’ai eu un peu peur, mais j’avais besoin de jouer, D2 belge ou pas. Là-bas à Eupen quand je jouais bien, j’avais des contacts avec le Standard de Liège, ça pouvait se faire, ça va vite le foot.
Tu reviens finalement à Florence l’été 2011
Là ils m’ont clairement dit qu’il fallait que je trouve un club, j’ai même pas fait de préparation, j’arrive au Hellas le 31 aout, j’étais en retard. Je débarque là-bas et il y a des problèmes entre le coach et le directeur sportif, et physiquement j’étais pas au top, j’ai eu besoin de deux mois pour me mettre à niveau, sauf que le coach ne faisait pas jouer les joueurs que le directeur avait ramené, c’était un bordel. Le premier match que j’ai joué, j’étais sur le banc, y avait plus personne. On perd 1-0 contre Modena, Mandorlini se retourne vers moi et il me dit de rentrer, genre, “y a plus que toi de toute façon” et il me fait rentrer sans vraiment compter sur moi. Et je marque, 1-1 et après on gagne 2-1 à la fin. A partir de là, j’ai plus joué, d’ailleurs le match suivant, je joue et je met un doublé contre Grosseto.
T’es surpris de voir le Hellas là où il est aujourd’hui ?
Non non pas du tout, déjà l’année où j’y étais, on a failli monter. Mandorlini il est ce qu’il est, on ne s’est pas bien entendu, mais c’est un bon entraineur, l’aspect humain on n’était pas d’accord, mais tactiquement il est très compétent.
C’est un club qui t’as marqué ?
Écoute, à Zurich, j’ai jamais joué, les supporters c’était pas énorme et j’étais pas aimé. Je vais à Eupen où y a pas grand monde, ça se passait bien mais sans plus. J’arrive au Hellas, après mon doublé contre Grosseto, les supporters chantaient à ma gloire, les gens m’arrêtaient dans la rue. C’est énorme à Vérone, ça m’a marqué, car j’avais jamais eu autant d’affection et je voulais même rester à la fin de l’année.
Tu es plutôt polyvalent comme joueur, non ?
Oui dans un 433 je peux jouer à gauche ou à droite, en 442 derrière l’attaquant, je peux jouer 10, là où je me sens le mieux c’est à gauche mais peu importe où je joue, je donne souvent satisfaction.
Statistiquement, tu as inscrit autant de buts que tu en as offert
Mon style de jeu fait que j’aime bien mettre mes coéquipiers devant le but, quand tu marques tout le monde te voit, c’est top mais j’éprouve autant de plaisir à faire une passe décisive.
Et cette capacité à ne jamais marquer des buts ordinaires ?
Bah je sais pas, j’essaye, j’essaye, on voit les buts, mais on voit pas toutes les fois où j’essaye, ma qualité c’est la frappe et au bout du moment ça rentre, ça donne des beaux buts et du spectacle, mais je ne saurais pas l’expliquer.
Fin de ton prêt au Hellas, te voilà de retour à la Fiorentina, où tu fais même la préparation, comment ça se passe ?
Bah là quant tu vois le mercato qu’ils ont fait et la concurrence, y avait Jovetic, Ljajic, c’était bouché, je sais que j’y vais pour ne pas jouer encore. On s’est accordé pour résilier le contrat, c’était plus la même direction, Pradè avait remplacé Corvino, quelqu’un qui m’a beaucoup aidé, en revanche Pradè il a dû me parler une fois en un mois de prépa, il ne m’a pas calculé. J’avais pourtant fait six bons mois à Vérone. J’ai tout le même le regret de ne pas avoir joué avec la Fiorentina car c’est le club qui m’a fait grandir.
Tu le sens qu’il y a une grosse équipe qui se monte à ce moment-là ?
Oui, tout de suite, tu vois Montella débarquer avec son staff, ils savaient ce qu’ils faisaient, leur réussite ne me surprend pas.
Pourquoi choisis-tu Novara ensuite ?
Après mes six bons mois à Vérone, j’étais pratiquement sûr de retrouver une Serie B, j’avais plusieurs offres, mais quand je posais des questions sur Novara, on me disait que c’était pro, cadré, un club qui descendait de Serie A qui veut pas mourir en Serie B. Le projet me plaisait, j’ai signé un an plus une année en option.
La saison se passe bien et crack…
Au meilleur moment, fin mars, on fait que gagner, on remonte, j’enchaîne les buts, les passes decs, mais mon genou me lâche, c’était ma première grosse blessure. En plus le club loupe la montée aux play-off, comme avec Vérone l’an passé où je m’étais aussi blessé à ce moment là. Je dis pas qu’en jouant on serait monté à chaque fois, mais quand tu perds et que tu joues, t’as forcément moins de regrets.
Comment se passe ton retour à la compétition ?
Pas de vacances, tout le monde part, moi je reste ici, j’ai de la chance qu’il y a Novarello où il y a tout à disposition, le kiné est resté et le préparateur aussi, on n’a rien lâché pour arriver plus tôt. Au bout de quatre mois et demi, j’étais déjà de retour à l’entrainement, on a pris le temps qu’il fallait pour mon retour à la compet. Je ne me sens pas encore à 100 %, quand je parle avec mes coéquipiers qui se sont faits les croisés, ils me disent qu’il faut au moins un an avant que le genou retrouve la sensibilité d’avant.
Et ça se passe comment niveau concurrence ?
Le coach n’a pas fait de mercato à mon poste, et ça j’ai apprécié, il savait que j’allais revenir, c’est aussi ça qui fait que je me dis que j’ai bien fait de venir ici.
L’objectif c’est la remontée ?
Au début de l’année quand on voit l’équipe qu’on a et qu’on sait qu’on est costaud, c’est ce qu’on se dit. On a bien démarré, mais on a bien freiné ensuite (Novara a changé d’entraineur quelques jours après l’interview, ndlr)
Le centre d’entrainement de Novarello, c’est un petit bijou, non ?
Y a vraiment tout, hôtel, restaurant, salle de muscu, piscine, tu peux pas demander mieux pour un joueur de foot.
T’as été gâté en Italie, Florence, Vérone…
Et j’ai fait aussi Zurich, j’étais à côté de Liège, que des belles villes, quand la famille venait, j’ai pas mal visité. Là Novara, y a Turin, Milan, la Suisse à côté, je suis encore bien tombé !
La France te manque ?
Oui et non, bon y a tous mes amis et ma famille au Havre, j’aimerais jouer dans un club à 20 minutes de chez moi et rentrer tous les soirs à la maison. Mais quand je vois la Ligue 2, y a pas un plus gros niveau qu’ici. Concernant la mentalité en dehors du foot, ici il y a un cadre de vie idéale, les gens ne se prennent pas la tête alors qu’en France on sait bien comment c’est, c’est des histoires pour rien partout.
Tu as eu l’opportunité de revenir au pays ?
A part des agents qui t’appellent “je peux avoir ça, je peux avoir ça” on sait ce que c’est, mais rien de concret. Jamais eu de contrat sur la table.
Hors du foot, tu construis ta vie
J’ai une fille de deux ans et quatre mois, ça change tout, si tu as passé une mauvaise journée à l’entrainement, tu arrives le soir, c’est que du bonheur.
Dernière chose, t’as une maîtrise de l’italien assez incroyable, c’est quoi ton secret ?
Pour moi l’italien, c’est super facile, j’ai dû mettre trois mois à parler. A Florence, on m’avait pris des cours, mais le problème c’est que c’était à 8h00 du matin et moi à cette heure, je dors ! J’y suis allé une fois et après basta. Je l’ai appris sur le tas, à force d’entendre les gens parler ça rentre, ça rentre. Mes coéquipiers dans le vestiaire me disent même que je parle mieux que certains italiens ! De toute façon, quand t’aimes quelque chose, c’est plus simple.
Quand on aime, on ne compte pas et quelque chose nous dit que Matthias est tombé amoureux de l’Italie ! In bocc’al lupo !
Valentin Pauluzzi @CalcioBilly
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